C’est sur l’excellente nouvelle de l’entrée en vigueur de l’Accord de Paris, en un temps record pour un accord environnemental multilatéral, que s’ouvre la COP22 le 7 novembre à Marrakech. Les efforts diplomatiques en vue de l’entrée en vigueur ont montré que l’Accord pouvait créer un effet boule de neige entraînant les pays, comme ceux de l’UE, à accélérer leur processus de ratification. D’autres signes sont venus alimenter cette dynamique. L’Accord de Paris a permis de conclure en 2016 deux nouveaux accords sur le climat visant à réglementer les émissions du secteur aéronautique et les émissions de HFC, les « super gaz à effet de serre ». Mais ces différents éléments ne sauraient suffire au regard de l’ambition nécessaire ; l’accord trouvé pour l’aviation, notamment, est trop faible.

La COP22 va donc ouvrir une nouvelle ère dans les négociations climatiques, celle de la mise en œuvre des engagements. Dans ce contexte, le test déterminant sera de voir, dès 2017-2018, si une masse critique de pays commence à mettre en œuvre effectivement leurs contributions nationales.

Qu’attendre de la COP22 ?

Progrès en matière de renforcement des capacités, d’adaptation et de financement

La COP21 a représenté une avancée significative de la part des pays en développement, qui ont accepté de nouvelles responsabilités importantes en matière de lutte contre le changement climatique. Ils l’ont fait sur la base de l’assurance que les outils permettant de soutenir leurs actions au niveau national seraient renforcés, notamment en matière de financement, d’adaptation et de renforcement des capacités. La COP22 devrait donc proposer un ensemble de nouveaux outils soutenant le renforcement des capacités dans les pays en développement. Cela comprend notamment le lancement d’une nouvelle initiative du Fonds pour l’environnement mondial visant à soutenir le renforcement des capacités en matière de comptabilisation des émissions dans les pays en développement, ainsi que la création d’une nouvelle institution dans le cadre de la CCNUCC pour coordonner les efforts de renforcement des capacités en cours. En matière d’adaptation, les négociations devraient permettre de progresser dans la définition des indicateurs et des paramètres pour une meilleure évaluation des progrès accomplis dans la réalisation de l’objectif global d’adaptation défini dans l’Accord de Paris. En ce qui concerne le financement, la question clé est de savoir comment les pays en développement reçoivent la feuille de route établie par les pays développés sur la façon de respecter leur engagement à mobiliser 100 milliards de dollars d’ici 2020. Ces trois enjeux – le renforcement des capacités, l’adaptation et le financement – sont tous chers aux pays en développement et, par conséquent, aux hôtes marocains de la COP22. La manière dont ces questions seront traitées sera essentielle pour assurer la stabilité du grand compromis atteint à la COP21 et pour renforcer la confiance collective envers ce nouveau régime climatique.

Une échéance claire pour la clôture des négociations techniques en 2018 afin d’ouvrir la voie à la phase politique en 2020.

La COP22 devrait clairement fixer 2018 comme date limite pour la deuxième convocation de la CMA (réunion des Parties à l’Accord de Paris) et l’adoption du règlement technique détaillé de l’Accord de Paris. Cela donnerait une échéance claire à ces négociations techniques, qui risqueraient autrement de se prolonger inutilement. Cela permettrait également de « préparer le terrain » pour la phase politique suivante, qui devrait débuter en 2018 avec le dialogue dit de facilitation visant à évaluer les progrès accomplis dans la réalisation des objectifs de l’Accord de Paris. Cette phase politique devrait aboutir à un nouveau cycle de contributions plus ambitieuses en 2020. Pour être véritablement transformatrices, celles-ci devront être préparées au niveau national et faire l’objet de coordination et de consultations informelles sur le plan international. Disposer d’un agenda clair de 2018 à 2020, libéré des négociations techniques, aiderait à rendre cela possible. Ce processus de révision des contributions s’inscrit dans un nécessaire renforcement de l’ambition collective, les contributions actuelles ne permettant pas d’atteindre l’objectif de limitation du réchauffement adopté lors de la COP21.

Progrès dans la mise en œuvre des initiatives des acteurs non étatiques

L’une des grandes innovations de la COP21 a été l’intégration de nombreuses initiatives d’« acteurs non étatiques », comme les villes, les régions et les entreprises. Celles-ci ont contribué à créer les conditions politiques propices à l’accord, tout en représentant (potentiellement) des engagements importants en tant que tels. La COP22 peut contribuer à assurer un suivi approprié de ces promesses. La COP22 peut contribuer à la poursuite de ce programme d’acteurs non étatiques, en continuant à offrir une plateforme pour le contrôle de ces engagements et de leur formalisation dans différents organes sectoriels (par exemple, à la manière dont les travaux du Conseil de stabilité financière vont commencer à formaliser les divers efforts des ONG et des entreprises en matière de divulgation des risques climatiques par le secteur financier). Le véritable défi pour ces quelque 75 coalitions sera à la fois de démontrer la crédibilité des promesses faites à Paris en décembre 2015, de montrer la réalité des actions entreprises depuis cette date, et de tester leur capacité à attirer de nouveaux acteurs. Cet Agenda de l’action constitue l’un des piliers ayant permis l’émergence des conditions favorables à un accord à Paris, et son rôle demeure crucial pour mettre en œuvre les transformations et la transition économiques qui s’imposent.