Paris, 11 novembre 2017 - À l’occasion des Transport Days, qui se déroulent dans le cadre de la COP23, l’Institut du développement durable et des relations internationales (Iddri) publie un rapport intitulé Beyond emission targets: how to decarbonize the passenger transport sector (comment décarboner le secteur du transport de passagers). Atteindre une réduction profonde des émissions liées au secteur du transport tout en répondant aux besoins de mobilité des populations est possible. Mais cela exige, au-delà du déploiement de technologies bas-carbone, une transformation complète du système des transports.

En 2014, le secteur du transport était responsable de 23% du total des émissions de CO2 liées à l’énergie (à savoir 7.5 GtCO2). Atteindre l’objectif fixé par l’Accord de Paris sur le climat exige de réduire considérablement les émissions causées par ce secteur. Il a cependant souvent été avancé que ce dernier est difficile à décarboner. L’ambition des engagements pour le secteur du transport dans le cadre des contributions déterminées au niveau national (NDC) demeure d’ailleurs très limité.

Le rapport de l’Iddri analyse des scénarios nationaux pour le transport de passagers, qui atteignent d’importantes réductions d’émissions, compatibles avec l’objectif de l’Accord de Paris, et cela dans quatre pays : France, Japon, Mexique et Royaume-Uni. Tous les scénarios atteignent de profondes réductions d’émissions par habitant, comprises entre 50% et 80 % selon les pays et les scénarios, pour atteindre une fourchette de 0.1-0.5 tCO2 par habitant en 2050, en baisse par rapport à 0.9-1.7 tCO2 en 2010.

Cette analyse peut fournir des éléments utiles au Dialogue facilitatif de 2018 et à l’élaboration, d’ici à 2020, de contributions déterminées au niveau national (NDC) plus ambitieuses.

Ouvrir la boîte des transformations sectorielles est essentiel pour la révision progressive des NDC et leur mise en œuvre : cela permet d’identifier les politiques et mesures concrètes et rend crédibles les objectifs en matière d’émissions

Michel Colombier, Directeur scientifique de l’Iddri

 

Le rapport de l’Iddri met en évidence cinq messages transversaux :

  • La décarbonation profonde du secteur du transport de passagers nécessite des actions fortes sur quatre piliers fondamentaux : la gestion de la demande de mobilité, l’efficacité énergétique, la décarbonation de l’électricité et des carburants et le passage à des véhicules et des modes de transport utilisant ces énergies bas-carbone. Seule une articulation cohérente de ces piliers, fonctionnant en synergie, permettra de réelles réductions des émissions.

    Décarboner le secteur du transport nécessite une stratégie globale. À titre d’exemple, en améliorant l’efficacité énergétique et en réduisant la demande de mobilité, une décarbonation profonde sera atteinte avec un déploiement plus progressif des véhicules électriques

    Yann Briand, coordinateur du DDPP-transport

     

  • La décarbonation profonde peut aider à réduire le temps et le budget liés à la mobilité contrainte pour les ménages, mais ceci nécessite de relever certains défis.

    Réduire les distances parcourues en s’appuyant sur une réorganisation de l’espace, développer le télétravail ou favoriser les transferts modaux vers des transports publics moins coûteux et des modes de transports non-motorisés permet de soutenir à la fois la décarbonation et la réduction de la charge liée aux déplacements qui pèse sur les ménages.

    L’effet positif des stratégies de décarbonation sur les budgets en 2050 ne devrait pas faire oublier les défis de la transition qui s’imposeront pendant la prochaine décennie, en particulier pour ce qui concerne les personnes les plus vulnérables. Pour relever ces défis, des politiques de développement d’infrastructures, tournées vers l’avenir, et des signaux économiques clairs, sont nécessaires

    Henri Waisman, directeur du Deep Decarbonization Pathways Project (DDPP)

     

  • La décarbonation profonde peut être compatible avec la satisfaction des besoins en matière de mobilité

    Dans les pays en développement, il est possible de décarboner le secteur du transport tout en garantissant une augmentation importante de la mobilité des catégories de population actuellement caractérisées par les taux de mobilité les plus faibles. Dans les pays industrialisés, la difficulté réside dans la capacité à maîtriser la tendance à la hausse de la mobilité, induite par des facteurs tels que l’étalement urbain et l’organisation des modes de transport en ville. Des villes plus compactes ainsi que le développement des téléactivités sont essentiels pour entraîner une réduction de la distance moyenne parcourue par personne.

     

  • La décarbonation profonde devrait combiner des actions spécifiques au contexte, adaptées aux différences entre les pays, entre les besoins de mobilité et entre les distances des trajets effectués.

    Les facteurs de mobilité sont fondamentalement différents dans les zones urbaines et non-urbaines. Dans les zones urbaines, compte tenu de la densité de population plus élevée, le transfert modal vers le transport public et des modes de transport non-motorisés pour les distances courtes joue un rôle crucial dans le processus de décarbonation. Le transport non-urbain, quant à lui, continuera de reposer sur des modes de transport privés, qui doivent évoluer vers des solutions bas-carbone.

     

  • Le processus de décarbonation profonde devrait envisager une montée en puissance des technologies bas-carbone au cours de la prochaine décennie, cohérente avec les taux élevés exigés d’ici à 2050.

    Demeurer dans la limite d’une augmentation de 2°C nécessite que les véhicules bas-carbone représentent une part prépondérante du marché d’ici à 2030. Ceci implique un déploiement massif qui doit débuter dès maintenant afin de dimensionner le financement des activités de recherche, de développement et d'innovation, d’augmenter les incitations pour un déploiement plus rapide des véhicules alternatifs, et d’organiser la mise en place des infrastructures nécessaires.

     

Le projet DDPP-T

Le DDPP-T, coordonné par l’Iddri, est un projet sectoriel issu du Deep Decarbonization Pathways Project (DDPP), qui explore des trajectoires à faibles émissions de carbone pour le secteur de l’énergie. Il rassemble des équipes de recherche au niveau national, qui travaillent de manière indépendante vis-à-vis de leurs gouvernements, et qui sont responsables de leur étude pays. Les partenaires de recherche sont : UCL Energy Institute (Royaume-Uni); CIRED, EDF R&D et l’Iddri (France); Tempus Analitica (Mexique); NIES, Mizuho et IGES (Japon). Le projet se poursuivra en 2018 pour inclure le secteur du transport de marchandises et couvrir un plus grand nombre de pays.

 deepdecarbonization.org

 

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