Bangkok Négociations Climat

La session de négociations climatiques qui vient de s’achever à Bangkok (Thaïlande) a été convoquée en sus des traditionnelles sessions bi-annuelles de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC) pour tenter de palier la lenteur des progrès réalisés depuis près de deux ans quant à la définition des règles de mise en œuvre de l’accord de Paris. A-t-elle réussi à changer la donne ?

Les « règles du jeu » de l’Accord de Paris doivent être adoptées lors de la 24e Conférence des Parties (COP24) qui se tiendra à Katowice (Pologne) en décembre prochain. Elles incluent la manière dont les pays devront communiquer leur action en termes d’atténuation, d’adaptation et de soutien (notamment financier) aux pays en développement, les règles de comptabilité s’y rapportant, et comment ces actions seront revues, aussi bien au niveau individuel que collectif. Elles incluent également, notamment, la définition de nouveaux mécanismes d’échange international de crédits carbone, ou les échéances auxquelles l’ensemble de ces règles devraient s’appliquer. C’est une tâche complexe, et que les négociateurs ont trop tardé à attaquer de front.

Parvenir à adopter ces règles revient à trouver un équilibre délicat sur plusieurs questions : qu’est-ce qu’il est utile de demander dans un rapport, à quel degré de flexibilité ont droit les pays en développement, comment s’assurer que les nouveaux mécanismes permettent des réductions nettes au niveau mondial, etc. Derrière ces discussions, l’enjeu est de permettre aux pays de se faire mutuellement confiance quant au respect de leurs engagements respectifs.

Ces négociations se sont appuyées sur une volonté affichée de travailler dès l’ouverture de la session, que ce soit au travers de l’appel introductif de Patricia Espinosa (secrétaire exécutive de la CCNUCC) ou lorsque les délégués ont préféré à l’unanimité ne pas lire leurs déclarations officielles pour entamer sans tarder les discussions. En amont de la session, les diplomates en charge de faire avancer chaque élément à négocier ont consciencieusement synthétisé les options ouvertes, aboutissant au total à un monstrueux « outil » de 307 pages.

Mais derrière ce travail d’apparence technique, les négociations à Bangkok sont en filigrane rattrapées par des considérations politiques. Le retard pris dans la négociation de ces règles a pour conséquence que les autres éléments d’un accord entre Parties à la COP24, comme des contributions plus ambitieuses et de nouveaux financement climat, émergent à peine. La crise de gouvernance du Fonds vert pour le climat[1] et l’absence de progrès quant à la reconstitution de son socle financier sont des signaux particulièrement inquiétants pour les pays en développement. Les négociations ont par ailleurs encore une fois souffert du manque de leadership de la présidence polonaise de la COP24[2], qui n’a pas encore précisé sa vision d’un accord à Katowice, ni joué encore pleinement ce qui devrait être un rôle de catalyseur.  

Pendant cette semaine studieuse, le secrétariat de la CCNUCC a décidé de rallonger la COP24 d’un jour, actant le retard pris dans les négociations, et « l’outil » clarifiant les options sur la table (PDF) a été modifié, mais reste toujours aussi interminable . Il faut néanmoins se réjouir du fait que les pays se soient mis d’accord pour laisser les diplomates aux manettes de la discussion (les « co-présidents des corps subsidiaires » en langage onusien) préparer des propositions de texte d’ici à la mi-octobre. Leur responsabilité est majeure, dans la perspective d’une négociation et adoption de ces règles deux mois plus tard à la COP24 à Katowice. Rendre l’accord de Paris opérationnel est à ce prix.

 

Photo Source Le Figaro