Présentation
Le 16 juillet 2025, la Commission européenne a présenté une proposition de cadre financier pluriannuel pour la période 2028-2034, accompagnée d’un ensemble de propositions législatives, comprenant notamment la Politique agricole commune (PAC) et les modalités de gestion d’un « Fonds unique », auquel la PAC est amenée à être intégrée. L’ensemble esquisse une nouvelle architecture budgétaire et réglementaire qui doit encore être négociée par les États membres et le Parlement européen. Ce Décryptage identifie plusieurs changements majeurs dans les propositions de la Commission qui seront autant d’enjeux clés pour les négociations à venir au regard de la transition du secteur agricole.
Messages clés
- La Commission européenne propose une nouvelle architecture pour la PAC, via la création d’un Fonds unique comprenant le budget de la PAC et l’introduction des plans de partenariat nationaux et régionaux (PPNR). Elle ouvre ainsi l’espace des négociations à des acteurs non agricoles, et donc à une plus grande variété d’intérêts, ce qui pourrait favoriser une sortie du statu quo.
- La question budgétaire domine jusqu’à présent les inquiétudes des parties prenantes et des États membres (EM), notamment en raison d’une baisse de 16 % en euros courants du budget pré-alloué à la PAC. Pour autant, ce budget ne représente qu’un seuil minimum : en raison de l’évolution des règles de co-financement et de la plus grande flexibilité octroyée aux EM dans l’allocation des fonds en gestion partagée, il n’est pas possible de quantifier précisément l’évolution des soutiens versés au titre de la PAC.
- Au-delà du budget, quatre enjeux apparaissent déterminants pour le futur du secteur :
• L’aide de base au revenu aux agriculteurs, outil phare de la PAC, est refondue afin d’améliorer sa répartition entre bénéficiaires et la cibler vers ceux jugés prioritaires sur la base de critères socio-économiques.
• L’architecture verte est repensée, avec une subsidiarité accrue, tant en ce qui concerne la conditionnalité des aides de la PAC que les mesures incitatives. Toutefois, l’absence de budget pré-alloué aux actions agro-environnementales et l’obligation pour les EM de les co-financer à hauteur de 30 % laissent envisager une faible adhésion de ces derniers à ces mesures.
• La Commission propose une gestion européenne des crises de marché mais renvoie aux EM la gestion des crises climatiques et sanitaires. Cela pourrait les inciter à renforcer les mesures de prévention améliorant la résilience des fermes, même si rien ne garantit qu’ils se saisissent de cette opportunité.
• Le modèle de performance conserve les faiblesses de la PAC actuelle : des indicateurs qui ne renseignent pas sur l’efficacité des mesures mises en oeuvre, une charge bureaucratique élevée et une faible incitation pour les EM à adopter des objectifs ambitieux.
- L’ambition et le cadre commun de la réforme envisagée par la Commission reposent sur les prérogatives que celle-ci s’alloue pour contraindre les EM dans l’élaboration et le suivi de leur PPNR. Toutefois, il est peu probable que ces prérogatives, peu populaires auprès des EM, survivent aux négociations entre EM et au Parlement européen. Dès lors, les co-législateurs devraient concevoir d’autres garde-fous pour préserver l’ambition commune, notamment environnementale, sans quoi la réforme se solderait par une politique proche de celle actuellement en vigueur au prix de la poursuite de l’affaiblissement de son caractère commun.