Deux ans et demi après la communication de la Commission européenne qui l’a lancé et deux ans avant les prochaines élections européennes, la période est propice pour dresser un premier état des lieux du Pacte vert européen et de ses apports. L’intention de départ, accélérer l’action pour la protection de l’environnement et la lutte contre le changement climatique pour rendre l’économie européenne plus durable était claire. Le Pacte vert a-t-il été à la hauteur des promesses soulevées ?

Un premier constat, le Pacte vert s’est bien traduit par des progrès tangibles et concrets dans les politiques publiques. L’adoption d’une loi climat et d’un objectif de neutralité climatique en 2050 dresse un nouvel horizon pour la société et les acteurs économiques européens. Le paquet de mesures dénommé ajustement à l’objectif – 55 % (Fitfor55), présenté en juillet a aussi permis de remettre rapidement sur la table une série de législations sectorielles permettant d’accélérer l’action climatique d’ici 2030 et a animé une grande partie des discussions sur la politique environnementale européenne durant le semestre écoulé. Un deuxième constat, les crises des deux dernières années, sanitaires d’abord avec l’irruption du Covid-19, puis géopolitiques avec le déclenchement de la guerre russe en Ukraine et économiques avec la montée des prix énergétiques et alimentaires, n’ont pas effacé le Pacte Vert de l’agenda politique. Celui-ci fait au contraire office de boussole pour la politique européenne comme l’ont montré la discussion sur le verdissement du plan de relance européen et la volonté d’accélérer la transition énergétique suite à la guerre russe en Ukraine. Tout ceci montre que les nombreux co-bénéfices à l’action environnementale sont mieux reconnus au plus haut niveau politique. Protéger l’environnement peut aussi permettre de réduire les dépendances de l’UE alors que l’autonomie stratégique du continent est fixée comme un nouveau cap collectif, par le développement des énergies renouvelables et de l’efficacité énergétique. Cela permet aussi de développer de nouvelles activités économiques plus durables à même de garantir la prospérité des citoyens européens et de positionner les acteurs européens comme des pionniers de l’économie bas carbone et d’être faiseur de normes.

Ces constats ne doivent cependant pas empêcher la réflexion sur les besoins et la manière de renforcer le Pacte vert alors que le contexte est devenu très incertain. Alors que les résultats en terme de réduction des émissions de gaz à effet de serre et de progrès vers les cibles de protection de la biodiversité des politiques du Pacte vert se font attendre, il est important de travailler dès à présent à l’évaluation des progrès prenant en compte toutes les dimensions du développement durable pour être en capacité de pouvoir réorienter les priorités politiques et identifier ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas. Ensuite, il apparaît clairement une asymétrie entre les transitions sectorielles, illustrée par les appels récents à ralentir le déploiement de la stratégie « De la fourche à la fourchette » alors que dans le même temps une accélération sur la transition énergétique est annoncée pour accélérer la sortie du gaz russe. Sur ce plan aussi, il apparaît primordial de travailler à de meilleures synergies entre les différentes priorités entre climat, biodiversité et sécurité alimentaire dans le domaine agricole et de l’usage des terres, aussi bien au niveau des cibles à atteindre que de la conception des politiques sectorielles tant ses sujets s’interconnectent. Enfin, le Pacte vert a aussi soulevé un certain nombre de craintes chez les partenaires de l’Union européenne que l’UE développe via son Pacte un agenda de protectionnisme  vert qu’il serait bon de lever en mettant à l’agenda des propositions de coopération alignées avec les objectifs du Pacte vert.

Le Pacte vert est donc bien parti, doit être renforcé et amélioré pour produire des résultats, mais il doit aussi être défendu et rendu irréversible, tant il est central comme base et comme horizon de stabilité à long terme pour le projet européen. Comment s'assurer qu'il reste la priorité des prochaines présidences de l'Union ? Qu'il soit au cœur du débat pour les prochaines élections européennes dans deux ans ? Sur l’ensemble de ces sujets, quel rôle peuvent endosser les différentes institutions de l’Union européenne ? Alors que la PFUE se termine, quel besoin de coordination entre les présidences successives du Conseil de l’Union européenne ? Comment renforcer l’ambition des dossiers en cours et quels sont les sujets importants sur lesquels l’UE doit se pencher pour la suite ? C’est pour répondre à ces questions et enrichir le débat sur ce qu’il reste à faire et les compléments nécessaires que l’IDDRI co-organise cette année, avec le think tank européen IEEP et avec le soutien des partenaires du réseau Think Sustainable Europe, la conférence Think 2030 à Sciences Po Paris. À partir d’un baromètre mesurant l’appréciation par des experts du développement durable de l’état du progrès du Pacte Vert et de ses grandes priorités et des points d’amélioration. Puis lors de quatre tables rondes, elle vise à recueillir les propositions pour améliorer des dossiers législatifs en cours et à venir comme le paquet ajustement à l’objectif -55%, le Mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (CBAM en anglais), la loi européenne sur la restauration de la nature et la loi-cadre sur les systèmes alimentaires durables.