Les coprésidents du groupe de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques chargé de parvenir à un accord sur le changement climatique de Paris ont publié leur version consolidée du texte formel de négociation « de Genève » comme outil pour aider les gouvernements dans leurs négociations. L'Iddri propose ici une première analyse de ce texte, ses atouts et ses limites, dans la perspective des deux dernières sessions officielles de négociations avant la COP21 qui se tiendront à Bonn en août et octobre.

Il ne reste que 10 jours pleins de négociation avant l’ouverture de la COP21 (2 sessions de négociations prévues à Bonn en août et en octobre), au cours de laquelle un nouvel accord sur le changement climatique devra être scellé. Le temps nous file entre les doigts à une vitesse alarmante. C’est la raison pour laquelle les Parties ont donné aux coprésidents de la négociation le mandat de préparer un nouveau texte simplifié pouvant servir de base de négociation quand les pourparlers reprendront à Bonn fin de août.

Voyons ce que ce nouveau texte fait et ce qu’il ne fait pas.

Tout d’abord, le texte n’élimine aucune option. Cela n’a jamais été son objectif ; il n’entend pas non plus se substituer à la négociation entre les Parties. Ce sera aux Parties, et à leurs ministres de retour dans leur pays, de trouver des positions de compromis. Lors de la récente consultation ministérielle informelle, les participants ont souligné le besoin de donner aux négociateurs des instructions claires permettant d’assurer une convergence sur les questions difficiles.

Deuxièmement, néanmoins, il faut noter que le texte accomplit un excellent travail d’identification des domaines où il y a convergence, et de ceux où des divergences cruciales subsistent. Il le fait notamment à travers sa structure, qui propose d’importantes pistes en termes d’organisation sur la façon dont pourraient être structurés la négociation et, au final, l’accord. La première partie contient des éléments susceptibles d’être inclus dans l’accord juridiquement contraignant devant être adopté à Paris. Elle comprend, tout d’abord, des dispositions cruciales pour l’accord qui ont rallié un niveau raisonnable de consensus, tout au moins dans leur plus simple expression, notamment des dispositions de base sur l’objectif de l’accord ou encore les contributions des Parties à cet objectif. Cependant, le texte permet également d’identifier des domaines où il existe des divergences significatives sur les questions fondamentales : on peut citer la différenciation entre pays développés et en développement sur la transparence et la responsabilité, ou encore les contours du « paquet » financement.

En ce qui concerne la transparence, la solution pourrait résider dans un cadre unique et flexible, permettant à toutes les Parties de participer et de s’auto-différencier en fonction de leur situation et du type de contribution qu’elles assument. Le paquet financement pourrait consister en un engagement collectif vers une réorientation des investissements, et des objectifs spécifiques pour la mise à disposition des financements, notamment pour les pays les plus pauvres et les plus vulnérables.

Soulignons que la première partie du texte ne fait que 14 pages – soit environ la longueur que pourrait avoir l’accord final.

La troisième partie du texte contient les dispositions de fond proposées par les Parties, et développe les dispositions de base qui figurent dans la partie 1. Il s’agit par exemple d’une cible spécifique d’émissions mondiales basée sur l’objectif de limiter le réchauffement à 2 degrés. Concernant ces dispositions, la gamme des propositions est plus large et les divergences plus nombreuses. De toute évidence, quelques-unes de ces questions devront être intégrées dans l’accord principal – certaines Parties pourraient s’inquiéter du manque d’équilibre sur l’adaptation dans la première partie du texte des coprésidents et préconiser la nécessité d’inclure définitivement dans le cadre de l’accord principal un certain nombre d’éléments figurant actuellement dans la troisième partie du texte.

Le texte permet ainsi trois choses essentielles :

  1. Il consolide les dispositions fondamentales raisonnablement consensuelles qui devront figurer dans l’accord. Il offre donc déjà un aperçu de l’accord potentiel.
  2. Il souligne les quelques points de divergence qui existent sur les dispositions essentielles devant figurer dans l’accord juridiquement contraignant. Une orientation politique pourra être nécessaire dans ces domaines, notamment dans le cadre des consultations ministérielles actuellement organisées par la présidence française, en juillet puis en septembre.
  3. Il fournit aux Parties un « menu » structuré d’éléments de l’accord plus détaillés et divergents, qui – par la négociation – pourraient être utilisés pour étoffer les contours de base de l’accord qui émerge de la partie 1 du texte des coprésidents.

Enfin, il est important de souligner que ce texte est un exercice collectif, développé par les coprésidents et les 11 co-facilitateurs des différents groupes de négociation thématiques. Cela s’inscrit dans la stratégie actuelle des présidences péruvienne et française, qui est de mettre en place un processus ouvert et participatif avec une appropriation partagée entre les Parties, les facilitateurs et les présidences. En cela, une leçon essentielle a été tirée de Copenhague, à savoir le besoin de maintenir un processus transparent et collectif.