La Conférence sur le climat de Paris (COP21) débute lundi 30 novembre. Après les événements tragiques du vendredi 13 novembre, Paris et le reste du monde apparaissent comme des endroits bien fragiles.

La COP21 a le devoir – et l’opportunité – de démontrer que ce constat n’est pas une fatalité ; que le dialogue et la coopération peuvent permettre à la communauté internationale, à grand-peine mais finalement de façon constructive, de gérer des problèmes communs, dont notre monde semble aujourd’hui souffrir de plus en plus.

Le changement climatique n’est pas un problème quelconque. Il risque d’en provoquer d’autres, des pénuries d’eau aux inégalités ; de la conservation de la nature à la sécurité nationale ; ou encore des pertes des moyens de subsistance aux risques en matière d’ordre international.

Plus de 150 chefs d’État et de gouvernement ont confirmé leur venue à Paris lundi pour l’ouverture de la COP21. Ce sera le plus grand rassemblement de dirigeants du monde en dehors de l’Assemblée générale annuelle des Nations. Cela témoigne de l’importance accordée par la communauté internationale au changement climatique.

Chaque dirigeant prononcera un discours, et beaucoup organiseront des rencontres bilatérales. Dans un monde qui semble parfois déchiré par la concurrence et par les conflits, quel doit être le message envoyé par les dirigeants et quel est leur rôle dans la COP21 ?

Avant tout, les dirigeants doivent saisir l’occasion de la Conférence de Paris pour exprimer leur aspiration à un monde de coopération et de dialogue. Le changement climatique n’est pas un jeu à somme nulle : personne ne gagnerait en cas d’échec, et les avantages de l’action collective sont substantiels. En revanche, l’incapacité à lutter contre le changement climatique aggraverait fortement les divisions déjà sévères concernant l’accès à l’eau, les terres, la nourriture, les technologies, etc.

Beaucoup de travail reste à faire dans les négociations pour parvenir à un accord à Paris. L’orientation donnée par les dirigeants dans leurs discours et les réunions bilatérales sera cruciale pour parvenir à un accord sur les questions fondamentales qui restent en suspens. Leurs discours seront examinés de près pour y déceler des signes de flexibilité ou d’entente sur ces questions ; et, comme avec l’accord sino-américain sur le climat en 2014, la terminologie choisie pourra être source d’inspiration pour le texte de l’accord lui-même.

Trois questions viennent en particulier à l’esprit à cet égard. La première a trait à la confirmation de l’objectif des 2°C, et surtout sa traduction en cibles de réductions d’émissions mondiales concrètes. De nombreux pays émergents, en particulier, sont réticents sur ce point, craignant qu’un accord sur un objectif d’émissions puisse ouvrir la voie à une approche plus directive de « partage du fardeau ».

Ainsi, l’objectif d’émissions mondiales devra être associé, et c’est là que les responsables politiques ont un rôle à jouer, à une vision politique pour une transition équitable vers cet objectif. Les pays devront chacun suivre leur propres trajectoires nationales vers cet objectif mondial, en tenant compte de leurs différents niveaux de développement. L’Accord de Paris doit fixer un objectif commun, mais aussi rassurer les pays sur le fait qu’ils pourront définir leur propre trajectoire pour y parvenir. Un accord équitable doit reposer sur cette combinaison d’objectifs communs et d’engagements nationaux.

La dernière question concerne l’adaptation et la résilience. L’adaptation est souvent considérée comme un problème local. Ce n’est pas faux. Mais il est aussi vrai que le manque de capacité d’adaptation au niveau local ou national peut rapidement avoir des implications internationales – migrations, crises alimentaires, questions de sécurité, etc. Les dirigeants doivent reconnaître que garantir la résilience des pays et de l’économie mondiale doit devenir une priorité internationale de premier ordre. Nos institutions scientifiques, économiques et politiques devront répondre aux conséquences du changement climatique, et cette réponse en est à ses prémices. Les dirigeants doivent saisir l’occasion de mettre en évidence ce nouvel agenda d’action ; tout comme la vulnérabilité financière a mobilisé toutes les institutions de gouvernance au lendemain de la crise financière de 2008, nous devons nous préparer pour la vulnérabilité climatique. Les dirigeants pourraient s’engager à réaliser de nouveaux efforts de financement importants pour l’adaptation et la résilience. Cela aiderait non seulement à surmonter l’important manque de financement pour l’adaptation, mais aussi la fracture politique qui existe sur cette question.

Le leadership consiste en la capacité à réinventer l’avenir, pour reprendre les mots de l’ancien Premier ministre australien Paul Keating. La tâche des dirigeants à Paris est de jeter les bases d’un accord qui définira cette vision pour les décennies à venir.