La protection de la propriété intellectuelle - par les brevets particulièrement - a pour objectif d'inciter à l'innovation ; mais elle freine aussi l'innovation, en privatisant ce bien public que constitue la connaissance attachée aux innovations réalisées dans un passé relativement récent. Entre ces deux effets, l'équilibre est délicat à trouver. Depuis un peu plus de vingt ans, les autorités politiques, techniques et juridiques responsables, aux Etats-Unis d'abord et par contagion en Europe et au Japon, ne cherchent ostensiblement plus à le trouver ; elles élargissent toujours plus le champ de la protection, donc de l'appropriation privée de la connaissance. Les déviances, politiques, techniques et juridiques, vont si loin qu'il n'est pas exceptionnel que le bénéficiaire d'une protection, d'un brevet en particulier, ne soit pas l'auteur de l'invention ou de la découverte protégée. Les sciences et techniques de l'information d'une part, de la vie d'autre part, sont particulièrement affectées par cette situation. C'est ce système qui a été imposé aux pays en développement, en utilisant abusivement à cet effet l'Organisation Mondiale du Commerce. Il en résulte que non seulement les pays en développement sont privés de la faculté, qu'ont exercée autrefois les pays maintenant développés, d'accorder le rythme d'extension de la protection de la propriété intellectuelle au rythme de leur développement ; mais qu'en outre le système uniforme qui leur est imposé est un système systématiquement biaisé. Les premiers résultats à en attendre sont une dégradation de la santé publique dans les pays en développement, et des transferts financiers des pays en développement vers les pays les plus riches. Ceci n?apparaît pas comme une bonne base de développement durable