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PARIS, 9 septembre 2021 – À l'approche de la pré-COP climat du 30 septembre à Milan (Italie), des chercheurs de 26 pays et experts de 3 secteurs d’activité publient une analyse inédite des progrès mondiaux en matière de décarbonation profonde réalisés depuis l'Accord de Paris de 2015, en examinant les multiples dimensions de ce processus, audelà des niveaux d'émissions de gaz à effet de serre. Coordonnée par l'Institut du développement durable et des relations internationales (Iddri), cette recherche de grande envergure extrait ainsi 10 marqueurs communs de la maturité du processus de décarbonation, destinés à fournir aux décideurs des repères clairs pour la planification des politiques et la définition de l'agenda de la coopération internationale, et ainsi contribuer à combler les lacunes en matière d'ambition et d'action climatiques mondiales.

Les 29 équipes scientifiques qui ont participé à cette recherche présentent dans le rapport les tendances et les progrès réalisés sur les leviers clés permettant d’activer la transition et de rendre les transformations structurelles possibles. Elles montrent également comment cette approche granulaire et ascendante peut aider à mettre en avant de nouveaux leviers pour accroître l'ambition et à partager les meilleures pratiques.

Pour Marta Torres Gunfaus, chercheure senior à l’Iddri et l’une des coordinatrices du projet, « ce rapport a pour but de rendre accessibles à l'échelle internationale les informations propres à chaque pays, afin de concevoir de nouvelles solutions pour une ambition climatique accrue. Une façon d'accélérer la transition est d'appliquer les leçons tirées de la façon dont les approches de décarbonation des pays et des secteurs ont évolué depuis 2015, et d'identifier les obstacles sociaux, techniques, économiques, politiques ou de gouvernance qui doivent être surmontés pour aller plus loin. »

Le professeur Chukwumerije Okereke, auteur du chapitre sur le Nigeria, ajoute : « Il est essentiel que les pays africains aient davantage l'occasion de raconter leur histoire concernant l'impact du changement climatique sur leurs sociétés, leurs efforts pour relever le défi et le soutien dont ils ont besoin de la part du reste du monde pour y faire face. »

Selon Emily Hosek, de SLOCAT (Partenariat pour un transport durable et décarboné) et auteure du chapitre sur le secteur des transports, « ce rapport est une ressource inestimable pour tous ceux qui cherchent à comprendre ce qui se passe réellement au-delà des chiffres, c’est-à-dire les principaux domaines de progrès en matière de climat et les obstacles restants aux changements nécessaires pour atteindre zéro émission nette d'ici le milieu du siècle dans les pays et secteurs clés. » ”

Par exemple, l'un des principaux enseignements du rapport est la manière dont les politiques et les institutions des pays ont été remodelées par l'approche du « compte à rebours de la neutralité carbone » créée par l'Accord de Paris. Ce nouveau cadre de référence a déjà abouti à des politiques et des évolutions de gouvernance transformatives dans de nombreux pays et secteurs à travers le monde. Cependant, les institutions, les mécanismes de gouvernance et les plans d'action concrets doivent encore s'adapter afin d’aligner la planification à court terme sur l'objectif à plus long terme de la neutralité carbone. Les stratégies de décarbonation actuelles des gouvernements et des entreprises restent pour la plupart insuffisamment détaillées, ambitieuses et applicables. De ce fait, souvent, elles ne parviennent pas à saisir l'ensemble des opportunités et des contraintes de la neutralité carbone, et ne tiennent pas pleinement compte des interactions avec les principales dimensions socio-économiques.

Emmanuel Guérin, directeur exécutif du Groupe international de la Fondation européenne pour le climat, insiste : « Certains critiquent les engagements "zéro émission nette" comme un moyen de retarder l'action immédiate, mais cette approche illustre ce que signifie réellement cet objectif. Pas seulement en 2050, mais aujourd'hui, en montrant les différentes trajectoires que les pays doivent emprunter. C'est essentiel pour atteindre les objectifs de l'Accord de Paris et maintenir le seuil de 1,5°C à portée de main. »

Une autre conclusion du rapport : outre la sensibilisation croissante du public au changement climatique, des débats de société inclusifs et ouverts ont émergé dans plusieurs pays sur la manière de réaliser les transformations rapides, larges et profondes impliquées par la neutralité carbone. Ces débats sont cruciaux en ce qu’ils peuvent aider les sociétés à arbitrer entre les différentes trajectoires vers la neutralité carbone, avec leurs impacts différentiels sur les groupes sociaux. La coopération internationale et le renforcement des capacités devraient contribuer à généraliser ces débats dans les pays afin de permettre à des débats nationaux de se développer de manière structurée, ouverte et utile.

Structure du rapport

Ce rapport intitulé Climate ambition beyond emission numbers: taking stock of progress by looking inside countries and sectors (« L’ambition climatique au-delà des chiffres d’émissions : bilans et perspectives nationaux et sectoriels ») a été coordonné par l’Iddri, en collaboration avec plus de 70 experts à travers le monde. Il peut être consulté à cette adresse : https://www.iddri.org/fr/publications-et-evenements/rapport/lambition-climatique-audela- des-chiffres-demissions-de-ges

Le rapport est constitué de 26 chapitres Pays et de 3 chapitres Secteurs. Les chapitres Pays décrivent les évolutions récentes des discours nationaux sur l'ambition climatique, la politique climatique nationale, la gouvernance nationale et les politiques et actions concrètes. Les chapitres Secteurs portent sur (1) les transports, (2) l'industrie et (3) l’utilisation des terres et changement d’affectation des terres et de la foresterie (UTCATF, AFOLU en anglais). Ces secteurs sont généralement considérés comme difficiles à décarboner, en raison de solutions technico-économiques compatibles avec la neutralité carbone moins clairement identifiées. Ces chapitres analysent les tendances récentes et révèlent les principaux obstacles à surmonter à court terme pour soutenir des transformations rapides et profondes.

Un « Résumé pour décideurs » est également inclus dans le rapport : il présente 10 messages transversaux issus des analyses nationales et sectorielles, qui peuvent constituer un guide de sélection des priorités pour l’action collective à mener dans la période qui suivra la COP 26.

10 marqueurs clés de la maturité du processus de décarbonation :

1. Des politiques climatiques mises à jour et des institutions qui reflètent l'approche du
« compte à rebours de la neutralité carbone » de l'Accord de Paris.
2. Des débats sociétaux inclusifs et ouverts sur les moyens d’atteindre une décarbonation
profonde des économies, et sur la gestion des arbitrages politiques associés.
3. Des narratifs, des institutions, des processus de gouvernance et des plans d’action
concrets pour guider à court terme la transition vers la neutralité carbone. Des
stratégies de décarbonation étendues (détaillées, ambitieuses et actionnables)
définies par les acteurs publics et privés. Une identification claire et exhaustive des
opportunités et contraintes liées à la neutralité carbone pour les acteurs clés. Des
feuilles de route permettant de prendre en compte les interactions entre les dimensions
socio-économiques clés.
4. Condition nécessaire, et critique, à une ambition renforcée : des processus
internationaux structurés pour l’apprentissage collectif et le partage des bonnes
pratiques entre acteurs de différents pays et secteurs.
5. Des stratégies nationales et sectorielles dotées d’une granularité d’informations
suffisante pour informer et accélérer les coopérations internationales sur la base des
besoins locaux.
6. Des flux financiers alignés sur les niveaux de ressources et de besoins des pays et
des secteurs. Pour y parvenir : des ressources additionnelles significatives ; une
cohérence avec des taxonomies compatibles avec les objectifs de l’Accord de Paris ;
des mécanismes financiers innovants ; un engagement renforcé du secteur privé vers
la transition zéro émission nette ; et des institutions, des processus et des législations
adaptées.
7. Des paquets de politiques cohérents permettant une diffusion à l’échelle des
technologies de décarbonation ; préparation des conditions sociales et
infrastructurelles adaptées à cette diffusion.
8. Dans le secteur de l’utilisation des terres et changement d’affectation des terres et de
la foresterie (UTCATF, AFOLU en anglais) : cartographie des défis spécifiques de la
transition liés aux impératifs sociaux du secteur agricole et forestier en matière
d’alimentation, de protection de la biodiversité et d’éradication de la pauvreté ; des
plans permettant de lever les barrières politiques et institutionnelles qui limitent la
capacité des décideurs à transformer le secteur ; des plans permettant de renforcer la
coordination au niveau domestique et la coopération internationale entre acteurs du
secteur.
9. Dans le secteur de l’industrie lourde : cartographie des changements nécessaires des
politiques commerciales et industrielles aux niveaux national et global permettant
d’accélérer l’adoption par les industries de technologies vertes ; et adoption de ces
changements.
10. Dans le secteur des transports : renforcement des politiques concertées et des actions
des gouvernements nationaux et infra-nationaux et des acteurs privés.