Présentation

Cette année marque le 10e anniversaire de l'Accord de Paris (AP) sur le climat. À l'approche de la COP 30 qui se tiendra au Brésil en novembre 2025, et dans un contexte de tensions internationales, de méfiance à l'égard du multilatéralisme et de vents contraires à l'action climatique, une réflexion approfondie sur ce que l'AP a permis de réaliser — et ce qu'il n'a pas permis de réaliser — au cours des dix dernières années est nécessaire, afin de documenter les débats sur l'action climatique et les impacts de l'AP, et de contribuer à façonner les discussions sur les mesures nécessaires au sein et au-delà de la CCNUCC pour l'avenir de la coopération climatique. Fondée sur une lecture détaillée des principes fondateurs de l'AP, et sur une analyse des preuves des progrès réalisés et des limites rencontrées, ce diagnostic vise à faciliter l'identification des domaines prioritaires pour soutenir l'atteinte des objectifs globaux fixés par l'AP.

Ce Document de travail a pour vocation à être être approfondi au cours des prochaines semaines à travers des discussions avec d'autres observateurs, en particulier d'autres think tanks, afin d'atteindre sa pleine valeur scientifique.

Messages clés

  • En 2015, la communauté internationale a conclu un pacte sans précédent : limiter le réchauffement climatique et bâtir un avenir fondé sur la résilience climatique et la justice. Depuis, l'Accord de Paris (AP) est devenu une boussole qui guide les gouvernements, les entreprises et les citoyens vers un monde neutre en carbone. L'impact est visible : presque tous les pays ont fixé des objectifs climatiques, une économie verte est en train d'émerger et la trajectoire des températures a radicalement changé, passant d'une augmentation dangereuse de +4°C à une augmentation toujours dangereuse, mais moins grave, de +2,1 à +2,8°C.  
     
  • L'AP a permis des progrès collectifs sans précédent, mais les résultats sont encore insuffisants. La transformation structurelle est en cours, mais elle est incomplète, inégale, et trop lente au regard des ambitions ; les résultats doivent en effet être évalués en fonction des progrès réalisés vers l'atteinte des objectifs, mais aussi en fonction de leur rythme. Sans changement radical, il ne sera pas possible de maintenir l'objectif de 1,5°C.  
     
  • Malgré ses imperfections et les changements géopolitiques intervenus depuis 2015, l'AP et la théorie du changement qui le sous-tend restent un cadre multilatéral viable pour atteindre les objectifs climatiques, qui doit être renforcé, au sein comme en dehors de la Convention climat. Des améliorations ciblées en matière de gouvernance sont nécessaires pour renforcer la coordination, garantir la responsabilité et la redevabilité politique à court terme et favoriser une intégration plus centrale du développement et de l'équité dans les stratégies climatiques. La feuille de route et les outils fournis par l'Accord de Paris doivent désormais être portés par un leadership collectif, fondé sur la science, la solidarité et le courage politique, pour tracer la voie à suivre.  
     
  • Une action universelle est essentielle, et a de fait déjà largement fonctionné dans le cadre de l'Accord de Paris, garantissant une large participation et un suivi juridique dse actions. Cependant, la dynamique est fragile, avec des signes précurseurs d'un affaiblissement des engagements et d'un suivi insuffisant, tant en matière d'atténuation que d'adaptation ou de financement.  
     
  • La vision d'une économie verte se concrétise, marquée par la croissance des énergies renouvelables, la mobilité électrique et les objectifs de neutralité carbone. Cependant, cette transformation n'a pas pris en compte les inégalités ni les résistances au changement ; des aspects socio-économiques et juridiques essentiels restent sous-développés. La vision d'un développement inclusif et équitable grâce à l'action climatique est remise en question, ce qui entrave les progrès à travers le monde. Les inégalités entre les pays dans la répartition des bénéfices découlant de cette nouvelle économie et les progrès hésitants en matière d'adaptation aux risques climatiques croissants menacent l'engagement universel pour l'avenir.  
     
  • L'Accord de Paris, qui n'a pas été conçu pour opérer une transformation structurelle à lui seul, a créé l'espace juridique et politique nécessaire à une action mondiale coordonnée, conformément à ses principes fondateurs. Il a été pensé pour guider, catalyser, et créer une dynamique et une responsabilité politique, en particulier au sein des processus nationaux, mais aussi directement entre les secteurs, les institutions et les citoyens. Les acteurs non-étatiques jouent un rôle croissant, mais des difficultés liées à la fragmentation et à l'intégrité de leur action persistent. L'Accord de Paris a inspiré des actions de la part des entreprises, des gouvernements locaux et de la société civile. Cependant, les efforts volontaires manquent souvent de robustesse, de cohérence et de responsabilité, ce qui met en évidence une faible coordination et des lacunes en matière de gouvernance.  
     
  • Les objectifs de zéro émission nette fixent une orientation claire en matière d'atténuation, même si des précisions sont nécessaires à l'avenir pour une meilleure appropriation. Les mesures d'adaptation sont à la traîne. Et le financement de la lutte contre le changement climatique, essentiel pour les pays en développement, reste enlisé dans l'ambiguïté et la méfiance ; l'alignement des financements est insuffisamment mis en œuvre, ce qui limite son impact sur le terrain.  
     
  • Des engagements ont été pris de façon quasi universelle dans le cadre de l'Accord de Paris, mais ne se sont pas traduite par une mise en œuvre nationale cohérente et efficace, en raison de l'inertie politique, d'obstacles institutionnels et d'un manque de soutien, ce qui renforce le déficit d'ambition.  
     
  • Sur la base de ce diagnostic, quatre priorités à court terme doivent être prises en compte pour renforcer l'efficacité du régime climatique multilatéral, dont certaines pourraient être mises en œuvre dans le cadre de l'Accord de Paris : (1) les signaux positifs en matière d'action climatique doivent être mieux diffusés, pour qu'ils soient forts, cohérents et capables d'entraîner une action soutenue de la part de tous les acteurs ; (2) le mécanisme d'ambition doit être amélioré afin de mieux traduire les objectifs à long terme en politiques et décisions à court terme et responsables ; (3) une plus grande attention doit être accordée aux facteurs facilitateurs de la mise en oeuvre au niveau national, en améliorant la compréhension des contraintes de pays et en apportant un soutien plus solide à leurs transitions ; (4) la différenciation des responsabilités doit être renforcée afin de refléter la situation particulière et le potentiel de certains pays à faire la différence, en particulier au sein du G20, et de promouvoir une plus grande équité en matière de responsabilité.
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