La Commission Canfin-Grandjean a publié hier son rapport, commandé par le président de la République française, François Hollande. Ce rapport étudie des options stratégiques conventionnelles et non conventionnelles pour augmenter l'investissement dans des projets d’infrastructures à faibles émissions carbone et résilients au changement climatique.

Après la crise économique, les banques centrales ont mis en place une série de mesures appelées « politiques monétaires non conventionnelles », comme par exemple l’assouplissement quantitatif ou les indications prospectives sur les taux d’intérêt négatifs. Comme l’ont noté Canfin et Grandjean, ces politiques ont permis de stabiliser l’économie mondiale, mais n’ont pas relancé l’investissement. Et les « investissements verts » restent bien en dessous de ce qui serait nécessaire pour ne pas dépasser les 2 degrés.

Une évolution politique et intellectuelle analogue est en train de se produire dans le domaine de la politique climatique. Jusqu’à présent, celle-ci était dominée par ce qu’on pourrait appeler les « instruments conventionnels de politique climatique » – tarification du carbone, normes et politiques sur les technologies telles que les tarifs de rachat.

Cependant, de plus en plus de travaux de recherche et d’expérimentation politique ont récemment, été réalisés sur les « instruments non conventionnels de politique climatique », notamment pour inciter plus fortement le secteur financier à investir dans des projets à faibles émissions de carbone et résilients au changement climatique.

Ceci découle du constat que l’absence de politiques climatiques conventionnelles de grande ampleur n’est qu’un des facteurs ralentissant l’investissement climatique. Les investisseurs sont également freinés par les autres incitations qui leur sont présentées, outre la politique climatique. Le court-termisme chronique et systémique du secteur financier n’en est qu’un exemple. Ces incitations résultent des structures actuelles du marché et, en partie, de la réglementation. Il apparaît essentiel de s’y attaquer pour libérer des capitaux pour l’investissement climatique.

Dans un récent article rédigé pour un think tank international de premier plan sur le climat et la gouvernance financière, le Centre pour l’innovation dans la gouvernance internationale (CIGI), l’Iddri et la CDC Climat Recherche ont examiné la raison d’être des politiques climatiques non conventionnelles relatives au secteur financier. L’article a également étudié les possibles points de départ qui permettraient aux institutions internationales de gouvernance financière de mieux intégrer les questions climatiques dans leurs mandats et travaux en cours. De nombreuses recommandations formulées dans cet article sont également présentes dans le rapport Canfin-Grandjean. L’article montre ainsi que les institutions internationales de gouvernance financière pourraient faire beaucoup pour mieux intégrer les questions climatiques, sans fondamentalement dévier de leurs mandats actuels. Un certain nombre d’entre elles, en particulier au niveau national, commencent d’ailleurs à le faire.

Il est donc encourageant de retrouver des points de vue convergents dans les analyses publiées dans différents rapports comme celui de la Commission Canfin-Grandjean, l’enquête du PNUE sur la conception d’un système financier durable, et le travail de l’Iddri dans ce domaine. Ils constituent la base de recommandations politiques qui pourraient être graduellement reprises dans des institutions comme le G20, le FMI ou les organismes de règlementation des banques et des assurances.